25 mars 2025
À quelques jours du Sommet « SOS Océan ! » organisé par Emmanuel Macron à Paris et alors que les ONG se mobilisent en force pour obtenir des aires marines réellement « protégées », BLOOM publie un rapport d’une importance majeure intitulé « S’affranchir du chalut », basé sur les résultats de plus d’un an de recherche de scientifiques de l’Institut Agro et du Muséum national d’Histoire naturelle. Ce travail montre qu’il est techniquement possible de se passer des méthodes de pêche destructrices : en France, 85% des volumes de poissons capturés par les chaluts de fond pourraient être pêchés par des techniques de pêche bien moins impactantes telles que les lignes, casiers et filets. Le rapport calcule aussi pour la première fois l’impact cumulé du passage des environ 800 chalutiers de fond français, soit 670 000 km2 détruits chaque année.
Par ailleurs, BLOOM publie une comparaison scientifique originale établissant que la déforestation des écosystèmes marins perpétrée par le chalutage de fond est 20 à 47 fois supérieure à la déforestation terrestre. L’étude estime que plus de la moitié de cette déforestation marine se déroule en Europe, sur plus de 2 millions de km2, dont près d’un quart (400 000 km2) dans ses aires marines dites « protégées ».
Le rapport « S’affranchir du chalut » s’appuie sur les résultats des scientifiques de l’Institut Agro (Didier Gascuel, Florian Quemper, Romain Mouillard) et du Muséum national d’Histoire naturelle (Harold Levrel)1Les chercheurs sont membres du groupement de recherche sur la transition sociale-écologique des pêches impulsé par BLOOM en 2022. portant sur la sortie de flotte progressive des chalutiers de fond, une technique de pêche destructrice qui abrase les fonds océaniques sur une surface équivalente à la superficie de la France, la Suisse et la Belgique, ravageant faune et flore sur son passage. Les chercheurs montrent qu’en France, 85% des volumes de poissons capturés par les chaluts de fond – encore autorisés dans les aires marines dites « protégées » – pourraient être pêchés par des techniques de pêche bien moins impactantes appelées « arts dormants ».
Le rapport de BLOOM met également en lumière le fait que le chalutage de fond a la pire empreinte en matière d’environnement et d’économie de toutes les méthodes utilisées par les flottes de pêche françaises. Pourtant, les chaluts et sennes captent 70% des subventions publiques. Sans ces aides publiques, la majorité de ces flottilles ne seraient pas rentables. Le constat est tragique : en France, la pêche qui crée le moins d’emplois et impacte le plus l’océan est celle que la puissance publique choisit de soutenir coûte que coûte.
Malgré les aides publiques, le modèle des chalutiers de fond est condamné : la déchalutisation a déjà commencé et les captures de chalutiers sont en forte régression depuis quinze ans. Avec volonté politique, ce processus de casse aurait pu être anticipé et la transition organisée via une politique de reconversion des pratiques destructrices vers des arts dormants. À travers le contrat stratégique de filière, 700 millions d’euros ont été accordés pour reconduire la recette du désastre et encourager l’industrialisation du secteur. Le Président Emmanuel Macron a choisi la voie du technosolutionnisme qui contribuera indéfectiblement à l’augmentation de l’effort de pêche et de la pression sur les écosystèmes, ignorant ainsi toutes les recommandations scientifiques. Une telle somme aurait dû au contraire servir à la transition vers une pêche véritablement durable, qui minimise son impact environnemental et maximise les emplois tout en contribuant à la souveraineté alimentaire.
Le rapport de BLOOM et les travaux des chercheurs montrent que nous tenons entre nos mains les premiers éléments pour libérer les pêcheurs et la société de techniques qui détruisent mécaniquement le vivant et les finances publiques. Il est grand temps que les décideurs s’en saisissent et élaborent un plan de transition du secteur à la hauteur du drame social et écologique en cours.
En analysant l’empreinte des flottilles de pêche (opérant en Méditerranée, dans l’Atlantique Nord Est et effectuant des pêcheries « distantes ») sur 10 indicateurs sociaux, écologiques et économiques, les chercheurs démontrent que le chalutage, en particulier le chalutage de fond, est la pire des pratiques.
Par ailleurs, à l’aide d’une estimation récente parue dans la revue scientifique Nature2Sala, E., Mayorga, J., Bradley, D., Cabral, R. B., Atwood, T. B., Auber, A., Cheung, W., Costello, C., Ferretti, F., Friedlander, A. M., Gaines, S. D., Garilao, C., Goodell, W., Halpern, B. S., Hinson, A., Kaschner, K., Kesner-Reyes, K., Leprieur, F., McGowan, J., Morgan, L. E., Mouillot, D., Palacios-Abrantes, J., Possingham, H. P., Rechberger, K. D., Worm, B., & Lubchenco, J. (2021). Protecting the global ocean for biodiversity, food and climate. Nature, 592(7852), 397–402. plaçant la surface mondiale chalutée à 4,7 millions de km2, BLOOM publie une note scientifique qui montre que la déforestation marine est 20 à 47 fois supérieure à la déforestation terrestre en termes de surface. L’étude estime que plus de la moitié de cette déforestation marine se déroule en Europe, soit plus de 2 millions de km2, dont près d’un quart (400 000 km2) dans ses aires marines dites « protégées ».
Devant ces résultats, la seule chose inéluctable est la sortie du chalut, non sa conservation. S’affranchir du chalut est une nécessité pour le vivant et la survie de la petite pêche côtière.
La fin du chalutage de fond est une évidence. Pour accompagner cette sortie, les chercheurs ont simulé un transfert des volumes réalisés par les chalutiers de fond de moins de 40 mètres vers des pratiques de pêche artisanale. Cette approche de transfert à volume constant montre pour la première fois que la « déchalutisation » est techniquement possible. Leurs résultats montrent que 85% des volumes pêchés au chalut sont techniquement transférables aux arts dormants (casiers, lignes et filets). Sur le total des volumes étudiés, 39% des volumes sont même « facilement transférables », c’est-à-dire qu’une réorientation des quotas octroyés aux chalutiers de fond vers des casiers, lignes et filets, permettrait de nous approvisionner en baudroie, merlu, sole commune, bar ou encore en congre autrement qu’en détruisant les écosystèmes.
Or, les quotas de pêche sont aujourd’hui en majorité captés par les industriels de la pêche en l’absence d’une application effective de l’article 17 de la Politique Commune de la Pêche qui précise pourtant que : « les États membres utilisent des critères transparents et objectifs, y compris les critères à caractère environnemental, social et économique »1https://bloomassociation.org/recours-gracieux-quotas/.
La déchalutisation est une pièce majeure du puzzle de la transition sociale-écologique des pêches. Une pêche vraiment durable ne sera possible qu’à condition d’activer différents leviers qui tous concourent à une minimisation de l’impact des pêches sur l’environnement tout en la rendant pourvoyeuse d’emplois. Il est devenu urgent de :
La sortie du rapport « S’affranchir du chalut » s’inscrit dans une séquence de mobilisation inédite de la société civile, impulsée par BLOOM et lancée le vendredi 21 mars au théâtre du Châtelet à Paris lors d’une soirée dédiée à l’océan, intitulée VIVANT(s) devant 2 000 spectateurs pour demander des aires marines véritablement protégées. Tout au long de la semaine, BLOOM, aux côtés de la Coalition citoyenne pour la protection de l’océan sera mobilisée pour faire entendre aux acteurs politiques et à la grande distribution un message simple mais vital : protéger l’océan est simple, il suffit d’arrêter de le détruire.
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À cinq mois jour pour jour du lancement de la Conférence des Nations Unies sur l’océan accueillie par la France, BLOOM lance le radar du chalutage dans les aires marines françaises supposément « protégées ». Cet outil rend visible la destruction massive occasionnée par le chalutage de fond sur des écosystèmes vulnérables et précieux. Cette technique de pêche destructrice pour la biodiversité, le climat et la justice sociale se déroule aujourd’hui avec la bénédiction de l’État, qui autorise le chalutage dans les aires marines dites « protégées ».
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