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06 juin 2023

Performance écologique des groupes politiques européens : BLOOM publie une évaluation inédite

Alors qu’au Parlement européen, les députés de la Commission Environnement s’apprêtent à voter le 15 juin prochain une proposition de règlement européen essentiel pour restaurer et sauvegarder les écosystèmes terrestres et marins, la « Loi sur la restauration de la nature », BLOOM publie une évaluation factuelle et un classement inédit de la performance écologique des groupes politiques siégeant au Parlement européen depuis 2019.

Notre évaluation arrive dans un contexte particulier au Parlement où une alliance entre la droite et l’extrême droite appuyée par les libéraux du groupe ‘Renew’ a empêché l’examen de la « Loi sur la restauration de la nature » dans les Commissions de l’Agriculture (le 23 mai) et de la Pêche (le 24 mai).

Note moyenne des votes des eurodéputés par groupe politique européen. Leur position reproduit leur distribution dans l'hémicycle du Parlement Européen. La taille du camembert est proportionnelle au nombre d'eurodéputés par groupe :
EPP : 177 eurodéputés; S&D : 143 eurodéputés; Renew : 101 eurodéputés; Verts/ALE : eurodéputés; ECR : 66 eurodéputés; ID : 62 eurodéputés; La Gauche : 37 eurodéputés; Membres Non-Inscrits : 47 eurodéputés (Données du Parlement Européen, 5 juin 2023)

BLOOM a analysé la performance écologique de l’ensemble des eurodéputés selon les votes exprimés sur 11 textes relatifs au climat, à l’océan et à la biodiversité adoptés au cours de la 9ème législature du Parlement européen entre 2019 et 2023. Au total, 20 amendements-clefs, pour lesquels des recommandations de vote avaient été émises par les ONG et dont les résultats étaient disponibles ont été sélectionnés.

Pour consulter la méthodologie, cliquez ici.

« Ni de droite, ni de gauche » l’écologie, vraiment ?

Notre évaluation fait apparaître une division en trois blocs distincts très homogènes dans leur cohérence de votes et très polarisés entre eux :

  • La gauche écologique : un bloc d’alliés du climat et de la nature appelé « Les champions de la Terre » et composé de trois groupes politiques de gauche, notés entre 16,4 et 19,2 sur 20 :
    • L’Alliance progressiste des socialistes et démocrates (S&D) : un groupe de centre-gauche composé de partis sociaux-démocrates (dans lequel siège le PS et Place publique).
    • La Gauche : un groupe politique de gauche composé de partis démocratiques, socialistes, communistes et eurosceptiques (dans lequel siège la France insoumise).
    • Les Verts/Alliance libre européenne (Verts/ALE) : un groupe composé principalement de partis politiques verts et régionalistes (dans lequel siège EELV).
  • La droite et l’extrême-droite : un bloc d’ennemis du climat et de la nature appelé « Les destructeurs de la planète » et composé de deux groupes politiques de droite et d’un groupe d’extrême-droite, notés entre 3,3 et 4,5 sur 20 :
    • Le Parti populaire européen (PPE) : un groupe d’orientation chrétienne-démocrate, conservatrice et libérale-conservatrice (dans lequel siègent Les Républicains).
    • Les Conservateurs et Réformistes Européens (ECR) : un groupe de droite largement eurosceptique, anti-fédéraliste et conservateur (dans lequel ne siège aucun parlementaire français).
    • Identité et Démocratie (ID) : un groupe composé de partis nationaux nationalistes, populistes d’extrême-droite et eurosceptiques (dans lequel siège le Rassemblement national).
  • La droite libérale et les non-inscrits : un bloc ambigu et sans conviction vis-à-vis du climat et de la nature appelé « Les flip flops de l’écologie » et composé de deux groupes politiques, notés entre 10,3 et 13,7 sur 20 :
    • Renew : un groupe politique libéral et pro-européen, successeur du groupe de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe (ALDE) qui s’est dissous en 2019 pour former une nouvelle alliance avec la liste électorale « Renaissance » du président français Emmanuel Macron.
    • Non-Inscrits (NI en français) : un groupe qui réunit les membres du Parlement européen qui n’appartiennent pas à l’un des groupes politiques reconnus puisqu’il faut au moins 25 députés de 7 pays différents pour former un groupe politique au Parlement européen (c’est ici que siègent les députés « Reconquête » du mouvement d’Éric Zemmour).

Les surprises de notre évaluation

Le pire élève : la droite conservatrice, plus antiécologique encore que l’extrême droite

BLOOM s’attendait à ce que les députés de la droite conservatrice membres du Parti populaire européen (PPE) aient des scores très mauvais. Par exemple, lors de notre classement des eurodéputés français en matière de protection de l’océan en 2019, aucun des 21 élus français membres du PPE n’avait dépassé 5/20. Leur performance en matière d’écologie a encore chuté. De tous les groupes politiques européens, le PPE est celui qui obtient la pire moyenne, avec 3,3/20. Il arrive ainsi après l’extrême droite du groupe Identité et démocratie (ID), dont la moyenne s’élève à 4,5/20.

Les points saillants :

  • Sur les 175 députés PPE que compte notre analyse, seuls 9 ont une note située au-dessus de 10/20.
  • En queue de classement, c’est une hécatombe : 70 députés ont une note inférieure à 2/20 !
  • Le PPE ne compte que deux exceptions notoires en matière d’écologie, deux députés très isolés au sein de leur groupe sur ces questions, la Finlandaise Sirpa Pietikäinen (16,5/20) et le Belge Benoît Lutgen (14,5/20).

Des socialistes enfin devenus écolos !

C’est la bonne surprise de cette évaluation. Alors que le groupe socialiste (Socialistes et démocrates, S&D) a plusieurs fois adopté, par le passé, des positions incompatibles avec la protection de la nature et du vivant – par exemple, en défendant les positions des pires lobbies de la pêche industrielle lors de la campagne pour l’interdiction du chalutage de fond en eaux profondes dans les eaux européennes –, les socialistes européens, qui avaient annoncé leur aggiornamento écologique lors des élections européennes de 2019 et dont le programme était axé autour des Objectifs de développement durable (ODD) de l’ONU), l’ont réellement fait avec une performance écologique évaluée à 16,4/20. Non seulement, le groupe S&D n’enregistre aucune note inférieure à 10/20, mais 133 députés ont une note supérieure ou égale à 14/20. Force est donc de constater que leur promesse de campagne de 2019 est tenue.

La droite libérale des macronistes en position de bascule mais sans colonne vertébrale écologique

Sans surprise, le groupe Renew obtient une moyenne passable de 10,3/20, caractérisée par une diversité des positions qui se reflète dans la grande disparité des notes, allant de 3,1 à 18/20. L’absence de cohérence idéologique en matière d’écologie de Renew est d’autant plus regrettable pour l’avenir du continent européen que le groupe a la capacité de faire basculer les majorités au Parlement européen, ce qui lui confère un véritable droit de vie ou de mort sur les textes législatifs. Autrement dit, c’est le groupe Renew qui décide si « ça passe ou ça casse ».

Le 15 juin prochain, sa position sera ainsi déterminante pour la « loi sur la restauration de la nature », qui sera soumise au vote en Commission de l’Environnement du Parlement européen, et en plénière début juillet. Alors que Pascal Canfin affirmait que l’écologie est « la première urgence », il revient désormais à ce dernier ainsi qu’à Stéphane Séjourné, président du groupe Renew, de s’assurer de la discipline de vote de l’intégralité du groupe Renew et pas uniquement de la délégation française, pour empêcher un axe antiécologique de s’ancrer dans le paysage européen par une alliance irresponsable entre la droite libérale (RENEW), la droite conservatrice et eurosceptique (PPE et ECR), et l’extrême-droite (ID).

La droite libérale a l’avenir immédiat de nos civilisations entre ses mains

Il ressort de notre évaluation que la droite de l’échiquier politique européen a du mal à sortir de ses vieilles lunes pour se réinventer selon un axiome de responsabilité écologique face aux enjeux existentiels auxquels le changement climatique et l’effondrement du vivant nous confrontent, tandis que l’extrême droite, quant à elle, ne se distingue en rien de la droite conservatrice en matière de sabotage de la planète et du climat.

Notre analyse confirme une cohérence d’ensemble du groupe de la gauche écologiste qui est la réelle force progressiste en matière de défense du climat et de l’environnement. Mais pour que l’ambition environnementale de l’Union européenne devienne réalité, le bloc de la gauche écologiste dépend du bon vouloir d’un groupe libéral tiraillé entre l’évidence de l’urgence écologique et la pression des lobbies industriels.

Penser que le destin de nos sociétés dépend d’un groupe sans conviction est peu rassurant. Mais notre évaluation devrait permettre aux ONG et aux citoyens faisant campagne pour l’adoption de textes essentiels, comme la « Loi sur la restauration de la nature », de savoir vers qui cibler leurs efforts. En espérant que le groupe Renew se ressaisisse d’ici les élections européennes.

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