12 mars 2025
À l’issue des Journées européennes de l’océan, les principales organisations de défense des océans, BLOOM, Blue Marine Foundation, Défense des Milieux Aquatiques, National Geographic Pristine Seas, Oceana, Only One, et Seas At Risk, en collaboration avec des pêcheurs et scientifiques, demandent en urgence au commissaire Kadis d’appeler à l’interdiction des pratiques de pêche destructrices telles que le chalutage de fond dans les aires marines protégées (AMP). Ceci intervient en réaction aux commentaires du Commissaire européen Costas Kadis, qui, interrogé cette semaine sur la pertinence d’une interdiction du chalutage de fond dans les aires marines protégées (AMP), a déclaré : « Ma réponse est : cela dépend ». Notre message est clair : les pratiques de pêche telles que le chalutage de fond ont non seulement un impact négatif sur les écosystèmes marins, mais elles compromettent également la pérennité économique de la pêche durable, épuisent les stocks de poissons et compromettent la capacité des océans à atténuer le changement climatique.
« En tant que scientifiques, nous ne pouvons pas accepter une approche « au cas par cas » alors que les preuves sont accablantes : les pêches destructrices telles que le chalutage de fond sont incompatibles avec la conservation du milieu marin et n’ont pas leur place dans les aires marines protégées. Les données scientifiques sont claires : le chalutage de fond détruit les fonds marins, épuise les populations de poissons et libère de grandes quantités de dioxyde de carbone, contribuant ainsi au réchauffement de notre planète. Le fait d’autoriser des exceptions dans les eaux protégées sape les efforts de reconstitution des mers européennes et menace le leadership européen en matière environnementale. Nous espérons que le commissaire Kadis clarifiera sa position et s’engagera à interdire totalement le chalutage de fond dans toutes les zones protégées », a déclaré Enric Sala, Explorer in Residence et Executive Director de National Geographic Pristine Seas.
Monica Verbeek, Directrice de Seas At Risk, a déclaré : « La science considère l’océan comme un système interconnecté. Pendant trop longtemps, les États membres de l’UE ont défié les règles relatives à la protection des habitats marins et continuent d’autoriser le chalutage de fond destructeur dans des zones prétendument protégées. Le pacte pour les océans est l’occasion pour le commissaire Kadis de réparer cette erreur, non seulement en veillant à la bonne application des règles existantes en matière de restauration et de pêche, mais aussi en introduisant de nouvelles règles pour protéger correctement les AMP. En tant que biologiste moi-même, j’encourage le commissaire à se ranger du côté de la science et à assurer une véritable protection des AMP. En attendant, l’état désastreux des écosystèmes marins sera l’épée de Damoclès qui pèsera sur toutes les activités marines et les communautés côtières de l’Union européenne ».
« L’ensemble des océans devrait être géré de manière durable (comme l’ont convenu les parties à la Convention sur la diversité biologique dans l’objectif 10 du cadre mondial pour la biodiversité). Les zones marines protégées sont, par définition, destinées à protéger la biodiversité et le chalutage de fond est incompatible avec la conservation de la biodiversité marine. Il n’est pas sélectif et porte physiquement atteinte aux habitats des espèces. L’abandon des pratiques non durables n’est pas seulement important pour la conservation de la biodiversité, mais aussi pour le maintien de la pêche elle-même. Les transitions ne sont pas toujours faciles, mais l’industrie de la pêche en sera la première bénéficiaire », a déclaré Joachim Claudet, directeur de recherche au Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS).
Des années d’expérience plaident en faveur de la fin du chalutage de fond dans les AMP
La science est claire sur les impacts négatifs de la pêche, telle que le chalutage de fond, et les scientifiques se sont exprimés publiquement à plusieurs reprises pour demander la fin de cette pratique destructrice dans les AMP européennes et pour dénoncer les lacunes de l’UE. Plus de 250 scientifiques ont reconnu que l’autorisation du chalutage de fond dans les AMP est en contradiction fondamentale avec les objectifs de conservation. Des études montrent que les fonds marins constituent la plus grande réserve de carbone de la planète et que le chalutage de fond est la principale perturbation de cette réserve, libérant des quantités critiques de carbone dans l’environnement marin et finalement dans l’atmosphère . Les scientifiques avertissent également que moins de 1 % des eaux européennes sont efficacement protégées, car la plupart des AMP continuent d’autoriser des pratiques destructrices de pêche.
Vera Coelho, Vice Présidente adjointe d’Oceana Europe, a déclaré : « Plus de trois décennies après l’adoption de lois européennes visant à protéger la vie marine, la plupart des aires marines protégées de l’UE restent de simples lignes sur des cartes où même les activités les plus destructrices telles que le chalutage de fond sont autorisées. En 2023, plus de 250 scientifiques ont demandé l’interdiction de ces activités dans les AMP de l’UE, car la pêche destructrice n’est tout simplement pas compatible avec la notion de « protection ». À quelques mois de la Conférence des Nations unies sur les océans qui se tiendra en juin, la Commission européenne doit faire preuve de leadership politique pour sauver les océans et s’engager à appliquer pleinement les lois européennes sur la nature, une mesure clé du Pacte européen pour les océans ».
Les arguments économiques en faveur de l’interdiction de la pêche destructrice, en particulier du chalutage de fond, sont tout aussi solides que les arguments environnementaux. Une analyse socio-économique montre que la suppression du chalutage de fond dans les AMP se traduirait par un gain économique net de 8,4 milliards d’euros sur deux décennies et que chaque euro investi en rapporterait 3,41, les avantages l’emportant sur les coûts en l’espace de seulement quatre ans.
Assurer la transition du secteur de la pêche en abandonnant les pratiques de pêche destructrices au profit d’un modèle écologiquement et socialement durable fondé sur une pêche à faible impact et à petite échelle est une priorité tant environnementale qu’économique.
« Les connaissances locales et la recherche scientifique vont de pair. Les pêcheurs constatent directement les changements dans l’océan, et la science nous aide à les comprendre. Les deux nous disent la même chose : le chalutage de fond n’a pas sa place dans les zones marines protégées si nous voulons protéger la vie marine et l’avenir de la pêche. » Renato Galeotti, Président de l’association Casette dei Pescatori (la cabane des pêcheurs), Vada, Italie
« Nous dépendons d’un océan sain pour gagner notre vie. Le chalutage de fond dans les AMP endommage les fonds marins et perturbe la vie marine, ce qui rend la survie des pêcheurs aux méthodes durables plus difficile », Isaac Moya, pêcheur en Catalogne et cofondateur du collectif de pêche durable Empesca’t,
Les pêcheurs affirment que le chalutage de fond industriel épuise non seulement les stocks de poissons, mais compromet également la pérennité et l’avenir des communautés côtières qui dépendent de pratiques de pêche responsables.
Pêcheurs, scientifiques et ONG appellent à une action immédiate
À un peu plus de trois mois de la Conférence des Nations unies sur les océans (UNOC 2025), qui se tiendra à Nice du 9 au 13 juin, et où l’Europe se prépare à présenter son Pacte pour les océans, les ONG sont convaincues que les nouvelles réglementations et leur implémentation seront essentielles pour garantir la santé et le bien-être des océans. Pour s’aligner sur l’engagement de l’UE de protéger 30 % de ses océans d’ici 2030, la Commission européenne doit :
À l’approche de la Conférence des Nations unies sur les Océans qui se tiendra à Nice, l’Union européenne doit laisser la science guider ses décisions. Les preuves sont claires : le chalutage de fond détruit les écosystèmes marins et n’a pas sa place dans les aires marines protégées. Si la Commission européenne veut être un leader mondial en matière de protection des océans, elle doit s’engager à interdire les pratiques destructrices de pêche dans les eaux protégées.