24 mars 2023
La conclusion du sixième cycle de rapports du GIEC publiée ce lundi 20 mars fait la synthèse de huit années de travaux sur la réalité du changement climatique. Bien qu’il dresse un tableau très alarmant pour l’avenir du vivant et de l’humanité, le groupe d’experts a choisi d’insister sur la marge de manœuvre encore à notre portée pour éviter un scénario apocalyptique.
Toutes les solutions sont entre nos mains. Pour endiguer les effets du dérèglement climatique, l’obstacle principal n’est pas un manque de connaissances mais un manque de volonté politique. Comme l’a résumé le Secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, lors de la conférence de presse du GIEC, « la bombe à retardement climatique poursuit son compte à rebours, mais ce rapport est un guide pratique pour la désamorcer, un guide de survie pour l’humanité. »
Le message est clair, la direction précise et le contexte dramatique.
Le réchauffement de la planète a déjà atteint +1,1°C par rapport à la moyenne des années 1850-1900. Les émissions de gaz à effet de serre, qui en sont la cause directe, ne cessent d’augmenter. Alors que les États se sont engagés à ne pas dépasser 1,5°C de réchauffement planétaire lors de la COP21 à Paris, le GIEC prévoit que cette température soit atteinte dans une dizaine d’année. Pour la fin du siècle, nous nous dirigeons vers un réchauffement catastrophique de 3,2°C.
Pour espérer limiter ce réchauffement, il faut atteindre la neutralité carbone le plus vite possible. Les efforts de décarbonation pour se conformer aux objectifs de la COP21 semblent de plus en plus hors d’atteinte, tant nous accumulons les retards en maintenant le statu quo. Antonio Guterres exhorte les pays développés à atteindre la neutralité carbone avant 2040. Les pays en développement devraient faire de même avant 2050.
Trajectoire du réchauffement climatique selon nos émissions de gaz à effet de serre. Source : GIEC.
En effet, le réchauffement climatique est déjà là et constitue une « menace au bien-être de l’humanité et de la planète ». Tous les humains en font déjà l’expérience directe. Les dérèglements climatiques sont d’une telle rapidité et d’une telle ampleur que, d’une génération à l’autre, les gens naissent dans des régimes climatiques radicalement différents. Les plus âgés d’entre nous vivent leurs étés les plus chauds, tandis que les nouveau-nés vivent leurs étés les plus frais…
Scénarios d'émissions futures. Source : GIEC. Infographie : Le Monde.
Certains changements sont déjà irréversibles, comme le recul et la disparition de glaciers ou la destruction d’écosystèmes. Les conséquences spécifiques aux milieux marins sont alarmantes. Le réchauffement et l’acidification des océans ont énormément affecté les populations de poissons, la diversité des espèces et la vulnérabilité des écosystèmes. Au cours de la prochaine décennie, ce sont près de 10% des espèces marines et terrestres qui sont menacées d’extinction. Si rien n’est fait, la perte de biodiversité pourrait atteindre 80% d’ici la fin du siècle.
Cela pose un problème majeur pour la biodiversité marine et la souveraineté alimentaire. En effet, le potentiel de pêche diminuera de 20% à 30% dans les océans européens et indiens.
Risques de disparition d'espèces : pourcentage d'animaux exposés à des températures dangereuses selon le réchauffement climatique. Source : GIEC.
Élévation du niveau de la mer, perturbations des systèmes hydrographiques, intensification des phénomènes météorologiques extrêmes… Les risques auxquels l’humanité est confrontée sont immenses et particulièrement marqués dans la bande intertropicale. Autour de l’Équateur, plus de 3 milliards d’êtres humains vivent dans des contextes de très forte vulnérabilité au changement climatique. Ces dix dernières années, la mortalité liée au changement climatique était 15 fois plus élevée dans les régions les plus vulnérables. Si nous poursuivons sur la trajectoire actuelle, d’ici la fin du siècle, certaines régions vivront une majorité de jours dans l’année avec des conditions climatiques mortelles pour la vie.
Nombre de jours dans l'année où la chaleur et l'humidité poseront des risques pour la santé humaine selon le réchauffement climatique. Source : GIEC.
Le GIEC alerte sur cette injustice climatique criante : ce sont les pays les plus pauvres, qui ont le moins contribué au dérèglement climatique, qui en sont les premières victimes. La responsabilité historique des pays dits « développés » n’en est que plus forte. Pourtant, si des mesures d’adaptation et d’atténuation ont commencé à être prises, elles sont largement insuffisantes. Le GIEC souligne que les ressources financières et investissements dédiés au climat sont extrêmement insuffisants et complètement écrasés par les investissements fossiles. Il faudrait 3 à 6 fois plus de flux financiers verts pour espérer atteindre nos objectifs climatiques.
La principale cause du réchauffement reste l’extraction et la consommation des énergies fossiles : le charbon, le pétrole et le gaz. Ils représentent 80% des émissions de gaz à effet de serre. Le GIEC rappelle que les émissions des infrastructures fossiles déjà existantes suffisent à elles seules à exploser le budget carbone correspondant à 1,5°C : 80% des réserves de charbon, 50% des réserves de gaz et 30% des réserves de pétrole doivent rester dans le sol. Engager de nouveaux projets d’exploration et de production d’énergies fossiles conduira inexorablement à dépasser le cap des 2°C de réchauffement.
Franchir de tels caps plongerait l’humanité en territoire inconnu. Il existe en effet des points de bascule à ne pas dépasser sous peine de voir le réchauffement accélérer brutalement sous l’effet de nouveaux phénomènes naturels extrêmes : dégel du permafrost, mégafeux de forêts, perte des capacités d’absorption des écosystèmes marins. La probabilité d’atteindre ces points de bascule augmente avec le réchauffement.
Face à ce scénario catastrophe, le GIEC souligne que les solutions sont déjà entre nos mains, que l’argent nécessaire à une transition radicale de nos économies est disponible. L’obstacle auquel nous sommes confrontés est celui du manque de volonté politique. Puisque chaque dixième de degré compte, la moindre action entreprise aujourd’hui peut aider à limiter le réchauffement et augmenter nos chances de survie.
Trajectoires potentielles du changement climatique. Source : GIEC.
Les trois leviers prioritaires pour agir efficacement et rapidement sont :
Ce rapport du GIEC vient conclure les huit dernières années de travail du panel d’experts sur l’évolution du climat. Ses conclusions ne pourraient être plus claires : il faut agir maintenant, vite et avec force. Chaque semaine, chaque mois, chaque année passée à défendre le statu quo et à préserver des intérêts privés augure de catastrophes futures aux dépens des plus vulnérables et d’écosystèmes au bord de l’effondrement.
Dans ce contexte d’urgence absolue, BLOOM continue et amplifie son combat. Il n’y a pas d’alternative.
L’océan est en effet l’un de nos meilleurs alliés dans la lutte contre le dérèglement climatique. Le plancton et l’ensemble des écosystèmes marins absorbent, chaque année, près du tiers de nos émissions de CO2, captant autant de carbone que l’ensemble des forêts terrestres. Un océan vivant et en bonne santé est vital pour l’alimentation et la protection de l’ensemble des populations résidant sur les côtes, soit 60% de l’humanité.
Pourtant nous continuons à surexploiter ses ressources comme si elles étaient infinies. La France fait partie des mauvais élèves en la matière. Le gouvernement fait preuve d’un marketing environnemental éhonté pour cacher le vide abyssal de son ambition en matière de protection et de restauration des écosystèmes.
En 2025, la France accueillera à Nice la prochaine Conférence des Nations unies sur l’océan. Alors que le GIEC nous rappelle que le temps nous est compté, que les choix que nous prendrons dans les prochains mois et prochaines années détermineront l’avenir de l’humanité et des écosystèmes dont nous dépendons, charge à la France de protéger et restaurer l’océan à l’aune de l’urgence environnementale.
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