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20 juin 2023

Le Conseil de l’UE donne son feu vert à une loi sur la restauration de la nature amoindrie, la France dénuée d’ambition maritime

Réunis le mardi 20 juin au Luxembourg, les 27 ministres de l’Environnement de l’Union européenne ont donné leur feu vert à l’adoption d’une législation sur la restauration de la nature, se fixant l’objectif de restaurer au moins 20% des terres et des mers européennes d’ici 2030, et l’ensemble des écosystèmes dégradés d’ici 2050.

Alors que la position du Parlement européen est suspendue à des considérations électoralistes et à des manœuvres politiques de court terme de la part de la droite, de l’extrême-droite et des libéraux, le vote du Conseil de l’Union européenne démontre au moins la volonté des États membres de l’UE de dépasser le statu quo.

Néanmoins, les multiples reculs observés dans l’accord adopté par le Conseil témoignent de l’incapacité persistante des gouvernements à prendre la mesure de l’urgence climatique et de l’effondrement de la biodiversité. Au lieu de rehausser le niveau d’ambition maritime du texte, la France, qu’Emmanuel Macron décrivait comme une « grande nation océanique » dans une vidéo creuse de markéting à l’occasion du 8 juin (journée mondiale de l’océan), s’est bien gardée d’incorporer à sa position des mesures concrètes permettant de protéger immédiatement l’océan et les pêcheurs.

La France, première puissance maritime européenne, s’est ainsi distinguée par son absence de leadership, ayant été incapable d’éviter une série de reculs concernant la protection des fonds marins et le principe de non-détérioration des écosystèmes.

Par ailleurs, le Conseil a affaibli la proposition initiale de la Commission européenne, et est même allé jusqu’à barrer l’accès des citoyens à la justice sur les enjeux de restauration de la nature.

Mobilisation devant le Parlement européen à Strasbourg le 15 juin, avant le début du vote de la "loi pour la restauration de la nature" en Commission de l'Environnement. © BLOOM

La « loi sur la restauration de la nature » constitue pourtant la pierre angulaire du Green Deal européen sur son volet biodiversité, et revêt une importance capitale pour « ramener la nature dans nos vies » et assurer l’avenir des écosystèmes européens.

En fixant pour la première fois des objectifs européens contraignants en matière de restauration des écosystèmes, ce règlement européen devrait permettre de protéger et restaurer les habitats dégradés, de lutter contre le dérèglement climatique, de freiner la disparition rapide de la flore et de la faune, de protéger nos sociétés des événements climatiques extrêmes, d’améliorer notre santé et notre bien-être, et de sauvegarder les emplois européens en renforçant l’approvisionnement et les pratiques alimentaires durables.

En donnant son feu vert à une législation européenne sur la restauration de la nature120 votes favorables, 5 votes de rejet (Finlande, Italie, Pays-Bas, Pologne, Suède), 2 abstentions (Autriche, Belgique)., en se fixant l’objectif de restaurer au moins 20% des eaux européennes d’ici 2030, et l’ensemble des écosystèmes dégradés d’ici 2050, le Conseil de l’Union européenne a envoyé un signal fort aux députés européens qui doivent se prononcer sur cette proposition de règlement dans les tout prochains jours en Commission de l’Environnement du Parlement, puis en Plénière.

Mais, alors que la banquise arctique estivale est vouée à disparaître, que l’Espagne est en voie de désertification, que l’océan Atlantique est en proie à une canicule marine sans précédent, la position adoptée par le Conseil de l’UE enregistre divers reculs d’ampleur :

  • Une cible de protection et restauration des écosystèmes marins revue à la baisse, notamment pour les habitats marins établis sur des sédiments.
  • Un principe de non-détérioration des écosystèmes largement amoindri, en passant d’une obligation de résultat à une simple obligation de moyens.
  • Une exemption à tout objectif de protection et restauration des écosystèmes pour la mise en œuvre de projets liés, de près ou de loin, au développement des énergies renouvelables, « sans avoir à démontrer l’absence d’alternative moins dommageable», en dépit du soutien explicite des entreprises des énergies renouvelables éoliennes et solaires à une législation ambitieuse en matière de restauration des écosystèmes.
  • La suppression pure et simple de l’article dédié à l’accès à la justice, en contradiction avec la Convention d’Aarhus sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et à l’accès à la justice en matière environnementale.

La France, qui représente 45% du territoire marin européen, a donc failli à tirer l’ambition de l’Union européenne vers le haut en termes de protection des habitats et écosystèmes marins. Lors de sa prise de parole, le ministre de la Transition Écologique Christophe Béchu indiquait que « le sujet ce n’est pas seulement de cocher des cases dans des annexes (…) C’est de nous interroger sur notre responsabilité devant l’Histoire ». Force est de constater qu’en la matière, le « pragmatisme », la « flexibilité », et les « capacités d’adaptation pour nos cadres nationaux » loués par le ministre de la  Transition Écologique auront eu raison de cette « responsabilité devant l’Histoire » et des mesures immédiatement efficaces et nécessaires pour protéger l’océan, conformément aux recommandations du GIEC, de l’IPBES et de l’UICN :

  • Interdire les techniques de pêche destructrices, et notamment le chalutage de fond, dans les aires marines dites « protégées », afin que ces zones soient effectivement protégées des assauts quotidiens de la pêche industrielle.
  • Réserver les eaux territoriales européennes de la bande côtière des 12 milles nautiques aux pêcheurs côtiers pour empêcher les ravages engendrés par les navires industriels de plus de 25 mètres, qui laissent un désert dans leur sillage et perpétuent une concurrence déloyale en capturant en une journée autant de poissons que des centaines de pêcheurs artisans.
  • Donner aux navires de moins de 12 mètres utilisant des engins dormants un accès prioritaire aux quotas pour favoriser une pêche sociale et écologique qui protège l’emploi en même temps que la restauration des écosystèmes marins.

Restaurer la nature ne consiste pas à revenir à des temps anciens ou à mettre un terme à des engagements internationaux existants. Il s’agit d’engager la transition de nos économies vers des pratiques respectueuses des limites planétaires et des écosystèmes, de se réinventer pour faire face aux crises actuelles, de prévenir les impacts dévastateurs liés à l’effondrement de la biodiversité et au dérèglement climatique grâce à des écosystèmes vivants et résilients.

Cette transition se fera car les limites de la biosphère nous l’imposent. Il faut l’engager au plus vite, et avec équité sociale et financière pour tous les acteurs concernés, car le coût de l’inaction est gigantesque et s’accroît de jour en jour. Adopter une « loi sur la restauration de la nature » ambitieuse est une nécessité que les citoyens, les scientifiques, les villes européennes, les forums agricoles, l’UICN, le Consortium des muséums d’histoire naturelle et des jardins botaniques, ou encore la banque centrale européenne appellent de leurs vœux.

Face aux tenants d’un statu quo qui nous mène à l’abîme, nous avons aujourd’hui une occasion historique, unique, pour engager un virage écologique qui permette la restauration des écosystèmes terrestres, urbains, marins, fluviaux, agricoles et forestiers européens.

Le 8 juin, à l’occasion de la journée mondiale de l’océan, le Président de la République Emmanuel Macron annonçait publiquement « compter sur nous » pour « faire pleinement de la France cette grande nation océanique ». À deux ans quasiment jour pour jour de la Conférence des Nations unies sur l’océan qui se tiendra à Nice, ce sont plutôt les citoyens qui comptent sur la France et le Président de la République pour agir et protéger des écosystèmes à bout de souffle.

 

Photo : Wayne Pulford sur Unsplash

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