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04 novembre 2024

Chalutier géant ‘Annelies Ilena’ : BLOOM et plusieurs associations dénoncent un premier scandale du nouveau ministre de la mer

Alors que le gouvernement avait pris position en mai dernier contre le plus grand chalutier pélagique du monde, l’Annelies Ilena, 145 mètres de long, initialement destiné à fabriquer de la pâte de surimi pour le compte de la Compagnie des Pêches de Saint-Malo, le nouveau ministre Fabrice Loher serait en train d’œuvrer pour que ce navire-usine puisse finalement recevoir le quota de pêche français lui permettant d’exploiter le merlan bleu (la principale espèce composant le surimi). Une décision incompréhensible et indéfendable pour la biodiversité et les pêcheurs français, que plusieurs associations et syndicats, BLOOM, Pleine Mer, Mor Glaz, Bretagne vivante, AL LARK et Seastemik, dénoncent fermement.  

En mai dernier, les ONG, les syndicats, les pêcheurs artisans et plusieurs formations politiques se réjouissaient : après l’alerte lancée par BLOOM et la mobilisation transpartisane contre le chalutier néerlandais géant Annelies Ilena, le secrétaire d’État à la mer et à la biodiversité, Hervé Berville, avait annoncé l’annulation du transfert de quotas qui permettait l’exploitation par une entreprise française de ce monstre des mers, propriété de la multinationale néerlandaise Parlevliet & van der Plas (P&P). L’Annelies Ilena peut capturer jusqu’à 400 tonnes de poissons par jour, un volume qui incarne la prédation extrême de la pêche industrielle au détriment des pêcheurs artisans et côtiers.  

En décembre 2023, la Compagnie des pêches de Saint-Malo, également contrôlée par Parlevliet & van der Plas, a fait savoir qu’elle avait décidé d’installer son usine de surimi base à bord de l’Annelies Ilena, mais le navire étant trop grand pour entrer dans le port de Saint-Malo, l’entreprise avait prévu que le poisson soit débarqué aux Pays-Bas avant d’être importé à Saint-Malo par cargo. Le seul hic dans le plan de l’entreprise sous contrôle néerlandais était le quota. En effet, pour que ce projet puisse se concrétiser, un mic-mac de quotas devait avoir lieu, qui révèle la complexité des montages financiers des industriels de la pêche. L’Annelies Ilena, propriété néerlandaise, est immatriculé en Pologne. Pour pouvoir être exploité par une entreprise française sous capitaux néerlandais elle aussi, la France doit accepter de transférer vers la Pologne son quota de merlan bleu, puisque la Pologne n’en possède pas. L’État avait donc un rôle central à jouer pour empêcher le choix du gigantisme fait par une entreprise privée sur la base d’une ressource publique commune (les poissons). 

BLOOM avait adressé deux courriers en février et mars 2024 au Ministre de la transition écologique pour alerter le gouvernement sur l’illégalité de ce transfert de quota sans contrepartie au regard des règles européennes sur la stabilité relative qui implique le maintien d’un pourcentage fixe entre les États membres pour la répartition des possibilités de pêche concernant chaque stock halieutique.  

La mobilisation des associations, pêcheurs, élus et citoyens, notamment lors d’un rassemblement à Saint-Malo en février 2024, avait eu raison de la tentative de capture des quotas par les armements industriels au détriment des pêcheurs artisans et de la résilience des écosystèmes. En mai dernier, Hervé Berville, alors Secrétaire d’État à la Mer, s’était engagé à annuler ce transfert de quota de merlan bleu, et avait déclaré dans la presse : 

« Il n’y aura pas de transfert. Pourquoi ? Ils s’étaient engagés à faire un navire français. On est dans une situation où on ne débarque plus ses tonnes à Saint-Malo mais aux Pays-Bas. Notre but est de réduire nos importations, justifie Hervé Berville. J’assume mes décisions. ». 

Nous avions salué cette décision de bon sens. Mais aujourd’hui, cette décision est mise en péril par le nouveau ministre en charge de la mer et de la pêche, Fabrice Loher, défenseur des chalutiers et maire du port industriel de Lorient.  

« Nous avons appris qu’un accord aurait été trouvé pour que l’Annelies Ilena bénéficie tout de même du quota français de merlan bleu, en dépit des déclarations d’Hervé Berville.En acceptant une telle opération, le gouvernement ouvrirait la porte à une industrialisation effrénée et incontrôlée de la pêche, au détriment des écosystèmes marins et de la pêche artisanale », explique Laetitia Bisiaux, chargée de projet à BLOOM.  

Appel à rejeter l’industrialisation effrénée de la pêche

Dans un contexte de crise climatique et d’effondrement de la biodiversité, il est impensable d’accorder à une entreprise sans scrupules l’accès aux quotas français. Dans un courrier adressé au ministre Fabrice Loher, également maire de Lorient, premier port de pêche en France, nos associations l’exhortent à refuser l’octroi du quota de merlan bleu français à ce chalutier hors-norme et à prendre position fermement pour protéger l’emploi local et la pêche durable et mettre un terme à cette dérive industrielle qui menace la souveraineté alimentaire. La biodiversité marine et l’avenir de la pêche française en dépendent. 

BLOOM et les associations Pleine Mer, Mor Glaz, Bretagne vivante, AL LARK et Seastemik demandent également un rendez-vous d’urgence avec le ministre Fabrice Loher pour stopper ce projet destructeur et instaurer des mesures concrètes garantissant une gestion durable et équitable de nos ressources marines. 

FIN  

N.B : L’Annelies Ilena est un navire tristement célèbre dans le monde entier pour ses pratiques destructrices qui lui ont valu le surnom de “ Navire de l’enfer” en Mauritanie. Ces sept derniers mois, il a pêché au large du Chili et du Pérou et s’apprête à présent à revenir dans les eaux européennes pour pêcher le merlan bleu, destiné à la fabrication du surimi.

Crédit image : MarineTraffic – Helge Schilling

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