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11 décembre 2023

BLOOM attaque en justice pour obtenir la transparence sur les quotas de pêche

Alors que les négociations entre les États membres pour les quotas de pêche de l’année 2024 viennent de se conclure ce lundi 11 décembre, BLOOM a saisi le Tribunal administratif de Paris pour obtenir les plans de gestion établis par les organisations de producteurs (1). Ces documents détaillent les règles de répartition entre les pêcheurs au sein d’organisations de producteurs et, en fin de compte, permettent de comprendre qui récupère réellement les possibilités de pêche. Bien qu’approuvées par le Ministère, ces informations indispensables à l’analyse de la gestion des pêches restent toujours inaccessibles. 

Une répartition opaque des quotas

L’attribution des quotas s’effectue à plusieurs niveaux. Après avoir été négociés au sein de l’Union européenne, les quotas sont répartis au niveau national. En France, un arrêté fixe le quota attribué par espèce et par zone pour chacune des organisations de producteurs. Cependant, une fois que le quota est attribué à une organisation de producteurs, l’information devient opaque, et il est impossible de savoir quel navire récupère quelle part du quota. Alors que la transition du secteur est impérative, que la pêche artisanale meurt pendant que les navires industriels pillent en toute légalité les zones côtières et les aires marines protégées, il est essentiel de comprendre comment les possibilités de pêche sont réparties pour instaurer une gestion plus équitable et durable. 

Afin d’avoir accès aux règles de répartition, encadrées par le droit de l’Union européenne (2), BLOOM a demandé ces documents le 26 mai 2023. Mais l’administration s’y est opposée sous prétexte que ces documents étaient des documents préparatoires. Un argument inopérant, étant donné qu’en matière environnementale, toutes les informations doivent être communiquées et que, selon le Code rural et de la pêche maritime, ces plans de gestion sont des documents validés par le Ministre qui doivent être transmis à chacun des adhérents de l’organisation de producteurs. Ce refus de l’administration française constitue une nouvelle illustration de l’opacité qui règne dans le secteur de la pêche. 

BLOOM a donc saisi la CADA (Commission d’accès aux documents administratifs) le 28 août 2023. Celle-ci a émis un avis positif sur la communicabilité de ces informations. À présent, en faisant appel à la justice, BLOOM souhaite contraindre l’administration à nous communiquer ces informations. 

Une opacité qui bénéficie aux plus destructeurs

L’opacité profite aux industriels, leur permettant de s’octroyer la part du lion. En effet, l’organisation de producteurs boulonnaise, le FROM Nord, bénéficie de la plus grande part pour les espèces pélagiques, avec notamment 98,6% du quota de hareng et 100% du quota de merlan bleu. Dans ses adhérents on compte neuf navires industriels détenus par les armements France Pélagique, la Compagnie des Pêches de Saint-Malo et Euronor, des entreprises à capitaux néerlandais. Parmi eux, le Scombrus et le Prins Bernhard sont deux navires-usines qui pêchent intensivement en Manche, depuis la mi-novembre, dans des aires marines protégées proches de la côte. « Ces navires ne peuvent exister que parce que le FROM Nord leur attribue des quotas de pêche. Avec une capacité de capture de 200 000 kilos par jour, soit l’équivalent de 1000 navires de petite pêche, le modèle est à repenser entièrement, à commencer par le démantèlement de ces navires industriels au profit d’une pêche côtière de proximité. », explique Laetitia Bisiaux, chargée de projet chez BLOOM.

Cette demande d’informations accompagne notre remise en cause globale du système de répartition des quotas français. Le 2 octobre 2023, BLOOM et des pêcheurs artisans avaient saisi le juge administratif pour demander une répartition transparente et équitable de quotas par l’annulation de l’arrêté répartissant les quotas de pêche à l’échelle nationale.

A l’heure où le secteur de la pêche doit évoluer et opérer de toute urgence une transition vers des méthodes à faible impact pour stopper l’effondrement de la biodiversité marine et de la pêche artisanale, et face à la résistance du gouvernement français, nous espérons que la justice forcera une transparence totale sur les quotas de pêche et leur juste répartition. 

NOTES

(1) Le 26 mai 2023, l’association BLOOM avait sollicité la Première ministre afin d’obtenir de la communication les informations suivantes :

  • Les plans de gestion établis par chacune des organisations de producteurs et groupements de navires ayant bénéficié d’une attribution de quotas en vertu de l’Arrêté du 31 mars 2023 portant sur la répartition de certains quotas de pêche accordés à la France pour l’année 2023 ;
  • Les plans de gestion établis par chacune des organisations de producteurs et groupements de navires ayant bénéficié d’une attribution de quotas en vertu de l’Arrêté du 8 février 2023 établissant les modalités de répartition du quota de thon rouge (Thunnus thynnus) accordé à la France pour la zone «océan Atlantique à l’est de la longitude 45° O et Méditerranée » pour l’année 2023 ;
  • Les plans de gestion établis par chacune des organisations de producteurs et groupements de navires ayant bénéficié d’une attribution de quotas en vertu de l’Arrêté du 8 février 2023 établissant les modalités de répartition du quota d’espadon de Méditerranée (Xiphias gladius) accordé à la France pour la zone « Mer Méditerranée » pour l’année 2023.

(2) Article 17 « Critères d’attribution des possibilités de pêche par les États membres » du Règlement (UE) n°1380/2013 du 11 décembre 2013.

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