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15 mars 2023

150 tonnes de maigres en un coup de filet : ce crime qu’il faut délégaliser

Après la prise de 150 tonnes de maigre par le navire War Raog IV, soit 20% de la capture annuelle française de cette espèce, nous appelons l’Etat français à agir sur le vide réglementaire concernant la technique de la senne tournante et les espèces qu’elle capture.

Mardi 21 février 2023, au large d’Ondres dans les Landes, le War Raog IV, propriété de l’armement industriel néerlandais Cornelis Vrolijk, pratiquant la bolinche (la senne tournante de surface)1La senne tournante est un long filet encerclant, permettant de piéger des bancs de poissons entiers. a réalisé un coup de filet démentiel sur un banc de maigre (Argyrosomus Regius) capturant entre 120 et 150 tonnes de poissons de 10 à 80 kg, soit près de 20% de la capture annuelle de cette espèce par la pêche professionnelle française.

Le mouvement de panique des milliers de maigres capturés par la senne, a entraîné leur mort inéluctable. Aucun relâché n’est donc possible. Avec une capacité de chargement de 20 à 30 tonnes maximum, le bolincheur était donc contraint de rejeter entre 90 et 120 tonnes, un gaspillage potentiellement énorme, un crime contre la nature ! Un autre bolincheur, ainsi qu’une trentaine de bateaux de pêche professionnelle et des navires de plaisance ont « heureusement » pu récupérer la majeure partie de ces rejets.

Le mercredi 22 février, la criée de Saint-Jean de Luz a totalisé 115 tonnes de maigre vendus 4.5€/kg en moyenne, soit un prix dérisoire pour une espèce à haute valeur économique, dont le prix atteint 20€ le kg en criée. De nombreux navires, principalement des navires de petite pêche côtière, c’est-à-dire de moins de 12 mètres opérant à proximité de la côte, en dépendent. En 2022, de nombreux ligneurs et fileyeurs, ont compensé la baisse des quotas de sole et la faible présence de bar, par la pêche au maigre. C’est également une espèce très prisée par la pêche de loisir.

Moins on en sait, moins on règlemente

A l’instar de très nombreuses espèces, le maigre ne bénéficie quasiment d’aucune réglementation limitant sa pêche, à l’exception d’une taille minimale de capture, bien trop faible, fixée à 35 cm. Cette absence de réglementation s’explique par le manque de connaissances scientifiques sur la dynamique de la population de maigre.2Le parcours migratoire du maigre, l’existence potentielle de différents stocks ainsi que la dynamique du stock n’ont pas été étudiés. En d’autres termes, la pêche au maigre est une pêche à l’aveugle et la survie de cette espèce repose uniquement sur le « hasard » des captures issues de la pêche professionnelle qui oscillent entre 600 et 1000 tonnes par an en France. Nous ignorons si ces volumes prélevés (ainsi que ceux de la plaisance) sont véritablement soutenables.

Ce que l’on sait en revanche, c’est que ce type d’engins de pêche hyper-efficaces appliqués aux mauvais endroits, sur les mauvaises espèces, peuvent anéantir une population de poissons en quelques années. C’est le cas du chalut pélagique pratiqué par des navires-usines pouvant mesurer 144 mètres de long, du chalut semi-pélagique (dit « quatre-panneaux »), de la senne démersale et de la senne tournante, qui dispose d’une électronique ultra-performante permettant de détecter les bancs de poissons à plusieurs kilomètres, de filet de plusieurs dizaines de mètres de hauteur capables d’encercler des bancs de poissons de plusieurs dizaines de tonnes.

Le manque de connaissance ne doit pas justifier l’absence de règlementations

Ce vide réglementaire concerne d’autres espèces telles que les dorades, le pagre et les mulets. C’est même le cas du lieu jaune, qui, bien qu’encadré par des quotas de pêche, voit ses captures et la taille des individus décroître de façon dramatique sans que l’on ne bouge le moindre petit doigt…

Le manque de connaissance ne doit pas être un blanc-seing pour la surpêche. Nous connaissons depuis longtemps maintenant la grande fragilité des écosystèmes, et notamment des espèces à croissance lente et longue durée de vie dont font partie le maigre, le bar et les dorades. Au contraire, nous devrions disposer d’une réglementation précautionneuse, qui instaure des limites de tonnage, par navire, par période, ou encore des repos biologiques, afin d’éviter justement que les grands rassemblements de poissons sur le point de frayer ne soient victimes de ces actes insensés.

C’est pourquoi nous demandons à l’État français de prendre immédiatement des mesures d’urgence pour éviter qu’un tel drame ne se reproduise.

La pêche du futur ne doit assurément pas être une pêche destructrice mais au contraire une pêche de mesure et de qualité, respectueuse de chaque poisson qui est prélevé de l’océan.

Et à ceux qui se plaindront d’être passé « à côté du coup de leur vie », qu’ils pensent un peu à nos futurs pêcheurs, qui feront face à un océan pillé par des pratiques destructrices et qui nous accuserons d’avoir laissé faire une telle barbarie.

Signataires

  • Gwen Pennarun, Président de l’association des ligneurs de la Pointe de Bretagne
  • Anne-Marie Vergez, Co-présidente de la Plateforme de la Petite Pêche Artisanale Française
  • Denez L’Hostis, Président d’Honneur de France Nature Environnement
  • Philippe Garcia, Président de Défense des Milieux Aquatiques
  • Claire Nouvian, Présidente de l’association BLOOM
  • Marta Cavallé, Secrétaire générale de Low Impact Fishers of Europe

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