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18 avril 2024

Réponse aux accusations complotistes d’un élu à la dérive

Suite au communiqué de presse diffusé par Daniel Cueff lundi 15 avril 2024, BLOOM répond point par point aux propos mensongers et diffamatoires tenus par le Vice président Mer et Littoral au Conseil régional de Bretagne.

Monsieur Cueff,

Vos propos sont décidément irresponsables, en plus d’être complotistes et diffamatoires. Nous sommes sidérés qu’un élu, dépositaire du noble mandat de représentation des citoyennes et des citoyens vous ayant choisi pour porter leur voix, puisse s’affranchir à ce point de tout ancrage dans la vérité, les faits et la science.

Nous n’avons pas vocation à palabrer avec des esprits aussi mal intentionnés que le vôtre, nous pensons que c’est une stratégie de distraction et de désinformation destinée à nous faire perdre du temps.

Nous irons donc droit au but : vous mentez.

Et venant d’un élu, cela est très grave.

Vous nous prêtez des intentions que vous avez inventées de toutes pièces, dans le seul but de nous nuire et de protéger ceux dont vous prenez la défense très réelle : la grande distribution. Car oui, au fond, défendre mordicus la pêche industrielle et la technique de pêche la plus destructrice sous nos cieux, le chalutage, c’est défendre la grande distribution, comme le fait le faux label de pêche « durable » MSC.

Le chalutage, ultra subventionné, permet d’abaisser le prix d’achat du poisson de la grande distribution, qui est la seule vraie bénéficiaire de ce système vain et condamné par ses pertes financières vertigineuses comme par son épouvantable impact écologique et social. Voilà votre modèle. Ce n’est pas le nôtre.

Notre modèle, c’est une pêche à taille humaine, à impact limité, à forte valeur ajoutée. Une pêche de proximité qui repose sur une ressource abondante et des écosystèmes sains. Une pêche qui rémunère les pêcheurs pour leur travail honnête et régulier, qui leur permet d’avoir une vie équilibrée, de prendre soin des liens ainsi que d’une famille. Une pêche basée sur la recherche de profits sociaux maximaux et d’impacts écologiques minimaux. Une pêche construite sur des connaissances accessibles transparentes et partageables, à l’opposé du modèle de pêche industrielle opaque qui n’a comme seule finalité que l’optimisation des profits et la spéculation financière[1].

Notre modèle est à l’opposé de la pêche qui ravage les écosystèmes et le climat, embarque les marins sur des marées longues et harassantes et qui, à force d’épuiser les ressources, est devenue une pêche sans tête, sans cœur, une pêche aux subventions publiques, une pêche qui ne doit sa survie qu’à sa capacité à obtenir des décisions iniques d’élus sans vision et sans éthique.

Nous pensons que reconquérir notre souveraineté alimentaire se fera dans un mouvement simultané de reconquête de la dignité au travail et dans le respect absolu, inconditionnel de la nature et des humains, comme pour l’agriculture. Nos activités économiques et les prélèvements que nous faisons dans les milieux sauvages doivent être impérativement compatibles avec la préservation de l’intégrité physique et fonctionnelle des écosystèmes, avec la restauration d’une nature brutalisée par nos machines industrielles depuis des décennies, avec la protection urgente du climat ainsi que des espèces sauvages déclinantes et menacées dans la phase terrible de notre trajectoire sur Terre : la sixième extinction de masse qui n’est imputable qu’à nous, humains.

Ne pas reconnaître que nous avons un besoin impérieux de passer d’un mode de destruction de la nature à un mode de cohabitation avec elle vous classe dans la catégorie des climatosceptiques, ou plus exactement des « dénialistes » qui se défient de la science, se repaissent de faits alternatifs et répandent des soupçons pour éviter d’agir et de remettre en cause le confort – pour un tout petit nombre de privilégiés – du modèle dominant, basé sur l’extraction non durable des ressources, la destruction du vivant et l’exploitation des humains.

Nous allons répondre à vos oukases, point par point, sur la base de faits et non d’élucubrations. Et sur cette même base scientifique et factuelle, nous vous accusons.

Nous vous accusons d’être « l’idiot utile » des lobbies industriels, de valider leur stratégie d’emprise sur un secteur de la pêche exsangue qui aurait besoin d’être réellement défendu plutôt que d’être enfoncé dans une hémorragie sociale et financière interminable à cause de votre cécité et de la corruption morale des dirigeants qui abandonnent les pêcheurs artisans depuis des décennies tout en se réveillant à des moments opportuns, notamment avant les échéances électorales, pour occuper les médias et leur remplir le crâne de mensonges et de promesses, toutes piétinées et méprisées par la suite, comme vous le faites avec les travailleurs de la mer.

Depuis 1950, le nombre d’emplois dans le secteur de la pêche a été divisé par cinq, en particulier dans la pêche artisanale. Alors qu’elle représente plus de 70% des navires, utilise les méthodes les plus vertueuses, est la moins consommatrice de carburant et la plus performante sur le plan socio-économique, la petite pêche est menacée de disparition en raison de votre parti-pris pour les pêches industrielles.

Nous vous accusons de complotisme, à l’image de vos déclarations obscurantistes le 16 février dernier au Conseil régional lorsque vous vous êtes opposé au vœu des élus écologistes visant à protéger les écosystèmes et les pêcheurs artisans des îles de Houat et Hoëdic des méfaits du chalutage en condamnant leur volonté de pêcher « comme ils le voulaient » et en les accusant de vouloir ainsi « privatiser » leurs eaux. L’outrance de vos propos dédaigneux envers les pêcheurs artisans des îles, pratiquant tous des arts dormants sur des navires de moins de 12 mètres et soutenus par des élus locaux tels que le député du MoDem Jimmy Pahun et les maires des îles, est choquante.

Nous vous accusons de mensonges diffamatoires. Vous nous prêtez l’intention d’interdire la pêche et tentez ainsi de jeter le discrédit sur nos positions pourtant parfaitement claires et situées à l’opposé des absurdités que vous inventez de façon malhonnête. Nous vous rappelons que toute allégation ou imputation de faits visant à porter atteinte à l’honneur ou à la considération d’une personne constitue une diffamation, passible à ce titre de poursuites pénales. Nous vous sommons donc de citer très précisément les sources auxquelles vous vous référez pour justifier votre propagande complotiste anti-ONG et anti-BLOOM.

Nous en profitons pour rappeler à nos lecteurs que personne n’a autant pris la défense de la pêche artisanale que BLOOM dans les institutions et les tribunaux au cours des dernières années :

  • En 2018-19, BLOOM s’est battue pour faire interdire la pêche électrique au chalut aux côtés des pêcheurs artisans du Nord, et en 2019, nous avons gagné ensemble, avec eux, CONTRE le gouvernement français qui défendait un statu quo pour laisser les industriels néerlandais pratiquer cette technique destructrice en mer du Nord, et CONTRE le Comité national des pêches qui soutenait, quant à lui, son extension à tous les métiers et toutes les eaux de l’Union européenne. Les pêcheurs du Nord ont souffert comme jamais de cette trahison : leur criée à Dunkerque a fermé et il ne reste aujourd’hui qu’une poignée de navires.
  • En 2022, BLOOM s’est battue avec les pêcheurs artisans du Nord et de Bretagne pour faire interdire la senne démersale dans les eaux françaises. Nous avons gagné le vote en Commission de la pêche au Parlement européen le 12 juillet 2022 mais les pêcheurs ont encore été trahis par le gouvernement français et le Comité national : le 29 septembre suivant, le secrétaire d’État à la mer Hervé Berville les a abandonnés au cours de la négociation de trilogue et a soutenu les industriels néerlandais[2], tout comme le Comité national des pêches qui n’a jamais soutenu l’interdiction de la senne démersale réclamée par 98% des pêcheurs de Normandie et des Hauts-de-France[3].
  • En octobre 2023, nous avons saisi le Tribunal administratif avec des associations de pêcheurs pour obtenir transparence et justice pour les artisans dans la distribution des quotas et des licences de pêche, et cela CONTRE l’administration et le Comité national des pêches qui refusent de communiquer la clé de répartition des quotas entre navires[4].
  • Chaque hiver, nous nous battons contre les immenses chalutiers pélagiques qui viennent piller des volumes pharaoniques de poissons dans la Manche. Un seul de ces navires-usines capture en une journée l’équivalent de ce qu’attrapent 1000 unités de pêche artisanales. Ce problème persiste car le gouvernement refuse de s’opposer aux consortiums industriels néerlandais et français.

Nous accusons votre ignorance. Réduire « les pratiques pénalisantes pour l’environnement » à « la surpêche industrielle » en dit long sur votre inculture scientifique abyssale. La « surpêche » est le fait de prélever d’une population plus que son seuil de productivité maximale. Ce concept n’a rien d’écologique, car il est issu de la politique alimentaire productiviste de la première moitié du 20ème siècle : il ne considère en rien la manière dont les espèces sont pêchées, par qui et pour quelle finalité, ni les dégâts collatéraux des méthodes de pêche (y compris par des navires de petite taille) sur les habitats et les espèces non ciblées. Votre vision obtuse ignore totalement les enjeux écosystémiques pourtant cruciaux de protection de l’intégrité des habitats et de la biodiversité, mais aussi d’une distribution juste des possibilités de pêche, de l’échelle de prélèvements, ou encore de la valorisation des espèces pêchées.

Nous vous accusons de nier le consensus scientifique et le travail des organisations internationales. Vous laissez entendre que notre engagement pour la protection de l’océan serait lié à nos « préjugés » et à notre travail avec des « scientifiques militants ».

Alors, clarifions les choses :

  • Les panels intergouvernementaux sur l’évolution du climat (GIEC) et l’évolution de la biodiversité (IPBES) appellent tous deux à développer un réseau cohérent et efficace d’aires marines protégées pour lutter contre le dérèglement climatique et l’effondrement de la biodiversité.
  • L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), l’organisation internationale qui fait autorité sur les enjeux de protection des écosystèmes, et dont la France est membre, a établi sur la base du consensus scientifique international existant qu’une aire marine « protégée » devait interdire les infrastructures et activités industrielles en son sein, et notamment « la pêche utilisant des dispositifs de chalut traînés ou remorqués le long des fonds marins ou de la colonne d’eau ».
  • La « protection stricte », définie elle aussi par l’UICN, n’est pas le monstre « antihumaniste » que vous décrivez. La Commission européenne a d’ailleurs fait sien cet objectif de placer 10% de nos eaux sous “protection stricte”.

Nous vous accusons de jeter le discrédit sur la parole des scientifiques à des fins politiques. Et c’est précisément ce type de discours aux relents obscurantistes que 260 scientifiques incarnant la rigueur et l’excellence de la recherche française dans le domaine des sciences de l’océan viennent de dénoncer dans une tribune publiée aujourd’hui dans Le Monde. Face à l’absence de prise en compte de leurs alertes par les responsables politiques, ces derniers alertent sur la « défiance grandissante (qui) s’installe dans notre communauté scientifique vis-à-vis du pouvoir politique » et concluent en citant, parmi les mesures phares qu’ils préconisent en conclusion, « d’assurer aux AMP françaises le niveau élevé de protection recommandé par l’Union internationale pour la conservation de la nature ».

Aurez-vous l’audace de les qualifier, eux aussi, de “scientifiques militants” ?

Nous vous accusons de confusionnisme anti-démocratique. Vous tentez, au moyen de raccourcis flagrants et d’amalgames faciles, de faire porter aux ONG la responsabilité de la montée de la popularité de l’extrême-droite auprès des pêcheurs et le risque de chaos dans la société. Vous qui défendez les intérêts industriels, vous qui avez trahi les pêcheurs artisans avec la feuille de route halieutique que vous avez votée en février et que nous devrons attaquer devant les juridictions administratives si le Conseil régional n’accepte pas de la retirer, vous osez imputer aux ONG la perte de justice sociale et économique, de sens et de dignité de la société. Vous incarnez la gauche affaissée, embourbée dans ses petits arrangements médiocres, la gauche qui a trahi et dont les vrai.es électrices et électeurs de gauche ne veulent plus.

Vous avez trahi les pêcheurs. Vous avez trahi les écologistes. Vous avez trahi les citoyens. Nous aurons raison de votre détermination à détruire et à trahir.

Le monde est entré en zone de turbulences et cela nous contraint désormais à changer ou à périr. Nous avons choisi : le projet humaniste et naturaliste que nous portons est devenu une nécessité vitale pour l’humanité. Nous ne laisserons pas la médiocrité, l’égoïsme, la veulerie et son cortège de lâchetés et de compromissions avoir raison du monde auquel nous sommes attaché-es.

Nous serons sur votre chemin.

Nous sommes une force citoyenne, nous sommes une vision du monde, nous sommes la société qui se lève contre les imposteurs politiques et leurs complices industriels, nous sommes la détermination, nous sommes le nombre et surtout, nous sommes inépuisables.

Références

[1] BLOOM (2024) Changer de cap.

[2] https://reporterre.net/Une-trahison-l-Europe-renonce-a-interdire-une-technique-de-peche-destructrice

[3] Le Comité national a trahi le Comité régional des pêches de Normandie (CRPMEM) et l’Organisation des pêcheurs normands (OPN) et soutenu la senne démersale en appelant plutôt à son « encadrement » : https://www.comite-peches.fr/pour-une-gestion-durable-de-la-seine-demersale-en-manche-est/

[4] https://bloomassociation.org/bloom-et-des-pecheurs-artisans-attaquent-la-repartition-des-quotas/

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