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15 septembre 2020

Pêche électrique : un nouveau rapport de BLOOM dévoile l’ampleur cachée de la fraude aux Pays-Bas

Dans un nouveau rapport explosif, BLOOM pousse encore plus loin ses révélations sur la profondeur abyssale de la fraude néerlandaise dans le dossier de la pêche électrique. Grâce à l’analyse de données inédites auxquelles nous avons eu accès grâce à un lanceur d’alerte, nous avons réussi à déterminer que le nombre de navires néerlandais équipés en chaluts électriques était bien supérieur au nombre de dérogations officiellement accordées par les Pays-Bas. Nous avons également démontré que l’Allemagne — prétendument élève modèle — s’essayait elle aussi à la pêche illégale et que certains navires néerlandais, non contents d’être déjà en dehors du cadre légal, pêchaient dans des zones interdites. Face à l’effarante inaction de la Commission européenne dans ce dossier, BLOOM exige que des sanctions fermes soient prises contre les Pays-Bas et demande à la France ainsi qu’à la Belgique de saisir la Cour de justice de l’Union européenne.

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De nouvelles révélations de fraude

BLOOM a eu accès à des données inédites provenant de 6 des 11 criées néerlandaises.[1] Leur analyse nous permet d’affirmer aujourd’hui, sans aucun doute possible, que les Pays-Bas ont accordé bien plus que les 84 dérogations qu’ils ont officiellement renseignées. En réalité, ce sont au moins 95 bateaux qui ont pratiqué la pêche électrique. Ce sont également ces nouvelles données qui nous ont permis de prouver que le chalutier allemand sous capitaux néerlandais, le BRA-2 BUTENDIEK, s’est bel et bien équipé en avril 2020. Or, le règlement « Mesures techniques » en vigueur depuis le 14 août 2019 stipule on ne peut plus clairement qu’aucune nouvelle dérogation ne peut être octroyée à compter de cette date, et ce jusqu’à la suppression définitive des dérogations restantes fin juin 2021.[2] Le 20 juillet 2020, BLOOM avait déposé une plainte contre l’Allemagne auprès de la Commission européenne ; plainte restée sans réponse pour le moment.[3]

Profil d’utilisation des engins de pêche déclarés par le BRA2 BUTENDIEK, un navire de pêche battant pavillon allemand, illégalement équipé, et sous capitaux néerlandais

En couplant ces données de criée à celles de la trajectoire des navires, BLOOM a également découvert que le chalutier TH-10 DIRJKE pêchait illégalement à l’aide de chaluts électriques dans la zone côtière des 12 milles belges, alors que la Belgique a interdit cette pratique dans ses eaux territoriales.[4] À l’instar de l’ensemble de la flotte néerlandaise de chalutiers électriques, ce navire viole impunément la réglementation européenne censée encadrer cette méthode de pêche destructrice.

De la pêche électrique dans les aires marines protégées

Par ailleurs, labourer le fond avec un chalut — qui plus est électrique — nous apparaît comme étant clairement incompatible avec les objectifs d’une aire marine protégée. Pourtant, grâce à ces nouvelles données de criée associées aux trajectoires des navires disponibles sur le site Global Fishing Watch, l’ONG britannique et partenaire Blue Marine Foundation (BLUE) peut affirmer que le chalut électrique était encore fréquemment utilisé dans certaines zones protégées du Royaume-Uni l’année dernière. Des navires de plus de 40m comme le TX38 opèrent par exemple au nord du Banc de Norfolk, une aire marine protégée. BLUE rappelle qu’une étude du Cefas (équivalent britannique de l’IFREMER français) avait montré que la diversité des espèces marines était presque réduite de moitié dans les zones où la pêche électrique est pratiquée par rapport aux zones préservées de cette technique de pêche destructrice. Au moment de leur publication, ces résultats avaient confirmé les propos des pêcheurs artisans de la mer du Nord, qui se plaignent depuis des années de l’état quasi désertique des fonds marins après le passage des chalutiers électriques.

Un refus d’action préjudiciable

Ces nouvelles données renforcent le faisceau de preuves déjà accablantes qui existent sur les multiples fraudes commises par les Pays-Bas et révélées par la campagne européenne de BLOOM. Malgré tous ces arguments irréfutables, la Commission européenne s’obstine en refusant de sanctionner les Pays-Bas, permettant ainsi à l’industrie néerlandaise de s’affranchir en toute quiétude des règlements en vigueur.

Dans le courrier qu’elle nous a adressé le 30 juillet 2020, rappelons que la Commission a indiqué à BLOOM qu’elle prenait bien acte des infractions commises par les Pays-Bas tout en assumant de laisser les industriels néerlandais jouir de leurs licences illégales. Dans cette même lettre, la Commission nous a également informés de sa volonté de classer nos plaintes sans suite. « La Commission européenne creuse la tombe de la démocratie. Sa position traduit une collusion tacite avec les lobbies industriels et porte sévèrement atteinte à la confiance qu’ont les citoyens en nos institutions. Nous lui envoyons, par ce rapport, un nouvel électrochoc pour qu’elle agisse en faveur de l’intérêt général et qu’elle condamne une fraude qui dure depuis plus de 10 ans » fulmine Sabine Rosset, directrice de BLOOM.

Exigeons des sanctions contre les Pays-Bas

Le 2 septembre dernier, BLOOM avait officiellement demandé à la France de déposer auprès de la Cour de justice de l’Union européenne un recours en carence contre la Commission européenne. Aujourd’hui, nous demandons la même chose à la Belgique, également clairement flouée par le comportement inacceptable des Pays-Bas. S’il aboutissait, un tel recours pourrait en effet obliger la Commission européenne à poursuivre les Pays-Bas en justice pour pêche illégale. « Nous avons peu d’illusion, pour ne pas dire aucune, quant à la volonté de la Commission à agir contre les intérêts néerlandais. Jusqu’à présent, elle a systématiquement choisi la fuite en avant et continue de foncer tête baissée dans le mur, foulant au pied l’intérêt général et son rôle de Gardienne des Traités. Nous comptons sur des États membres comme la France ou la Belgique pour placer la Commission face à ses responsabilités et lui forcer la main à respecter son rôle » explique Frédéric Le Manach, directeur scientifique de BLOOM. Ces nouvelles révélations de fraude doivent être prises au sérieux et donner lieu à des sanctions exemplaires pour rétablir la justice.

Le scandale de la pêche électrique a déjà fait couler beaucoup d’encre et condamné de nombreux pêcheurs artisans à la faillite. Avec les nouvelles révélations de BLOOM et l’intention de la nouvelle présidence allemande du Conseil de rouvrir ce dossier, il risque désormais de connaître un second souffle.

Notes et références

[1] Il s’agit des criées de Colijnsplaat, Den Helder/Texel, Den Oever, Goedereede/Stellendam, Ijmuiden et Scheveningen.

[2] Annexe V Partie D du Règlement (UE) 2019/1241.

[3] À la tête de la présidence du Conseil de l’Union européenne, la Ministre allemande avait annoncé vouloir rouvrir le débat sur l’interdiction de la pêche électrique lors de son audition en commission de la pêche du Parlement européen le 3 septembre 2020. Elle avait sciemment botté en touche la dérogation illégale accordée par l’Allemagne soulevée par la députée Caroline Roose, et utilisé les éléments de langage des lobbies de l’industrie néerlandaise.

[4] Arrêté ministériel portant sur l’interdiction à la pêche pulsatoire dans les eaux territoriales belges de la zone des douze miles. Numac: 2019013793. Disponible à: http://www.ejustice.just.fgov.be/cgi/article_body.pl?language=fr&caller=summary&pub_date=19-08-09&numac=2019013793

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