02 décembre 2022
Trois chalutiers géants ont pris d’assaut les eaux territoriales françaises et pêchent à une proximité alarmante de la côte : un drame pour les écosystèmes marins et la pêche côtière artisanale.
Silence. Depuis une semaine, des monstres industriels néerlandais pillent les eaux dans le nord de la France et le gouvernement d’Emmanuel Macron ne dit mot.
Tout a commencé le 23 novembre, quand nous avons constaté la présence du Prins Bernhard sur la façade Manche. Ce chalutier industriel de 88 mètres de long est la propriété de France Pélagique, une filiale « française » du géant néerlandais Cornelis Vrolijk. Il s’agit d’un chalutier pélagique, un navire qui tracte un filet entre le fond et la surface. Sa proximité avec la côte est significative : dans ces conditions, son filet est aussi haut que la profondeur de l’eau, il racle donc également le fond. Son impact déjà désastreux pour l’environnement en est décuplé.
Ce navire a été rejoint dès le 24 novembre par le Scombrus, l’autre chalutier géant de France Pélagique. Quelques jours plus tard, le Carolien (126 m de long pour 17 m de large) de Cornelis Vrolijk a complété ce triste tableau. Nous l’avons observé très près des 6 milles français, près de Calais. Si la présence des navires franco-néerlandais étaient légales, la présence du Carolien dans les eaux côtières françaises est une provocation injustifiable.
Nous avons suivi les déplacements de ces monstres à l’aide de données satellites, mais les images transmises par des pêcheurs locaux ne laissent aucun doute : ces bateaux ne « stationnent » pas, ils pêchent.
4/9 : Le « Carolien » (126 m de long, 17 m de large) appartient au géant néerlandais Cornelis Vrolijk. Nous l’avons observé très près des 6 milles français près de Calais. pic.twitter.com/kdH5tRFjWK
— Laetitia Bisiaux (@Laeti_Bisiaux) December 2, 2022
Des industriels qui viennent piller la mer si proche des côtes, cela ne vous rappelle rien ? Nous l’avons déjà vu avec la senne démersale, qui aurait pu être interdite si la France ne s’y était pas opposée en septembre dernier.
Que fait le gouvernement pour soutenir les pêcheurs côtiers qui font face à la concurrence déloyale de ces industriels ? Rien. Pire, il est pro-actif dans la destruction de la pêche côtière artisanale. D’abord en laissant les industriels de la pêche électrique détruire l’océan pendant deux ans après l’accord finale d’interdiction, ensuite en laissant les petits navires sur le carreau sans licences Brexit. Enfin, en proposant un plan de casse ! Et où iront les quotas destinés aux navires côtiers ? Ils seront redistribués de manière totalement opaques aux navires restants, entrainant la concentration des ressources entre les mains de quelques industriels. À nouveau, les pires acteurs pour la biodiversité et l’économie locale sortiront gagnants de cette opération.
Les chalutiers géants ne sont que la partie visible d’un problème plus profond, celui d’un modèle qui concentre les quotas et les subventions publiques au détriment de la pêche côtière. Ces firmes ont encore de beaux jours devant elles tant que les représentants des pêcheurs et les décideurs politiques resteront complaisants.